Partie 4 : Sélectionner la meilleure solution

Temps :

A mobiliser : personne référente du projet, équipe de direction, des personnes de chaque département.

Budget :Appel à une prestation externe pour l’évaluation environnementale + commande des alternatives.

Vous y êtes presque !

Pour sélectionner les solutions alternatives les plus pertinentes, il vous reste à prendre en compte l’impact environnemental des solutions en les comparant entre elles et par rapport aux produits initiaux. Bien sûr, n’oubliez pas non plus les considérations d’acceptabilité sociale et de praticité (clientèle et personnel), ainsi qu’économiques.

4.1 Evaluer la faisabilité et l’impact environnemental des alternatives

a. Identifier collectivement les alternatives pertinentes pour mon hôtel
Vous bénéficiez désormais des informations nécessaires : description de l’alternative, fournisseurs possibles, fin de vie théorique, coût de l’alternative. Vous pouvez maintenant dégrossir la liste (si besoin) en appliquant des critères internes (faisabilité de la mise en place, perception du personnel et des clients, coûts…) pour ne sélectionner que les alternatives les plus pertinentes dans votre contexte. Ce travail mobilise plusieurs interlocuteurs (direction, chefs de service, cabinet d’expertise environnementale, groupe hôtelier…) qui ont chacun un point de vue différent. Gardez en tête qu’une phase de test est prévue pour juger de la faisabilité du déploiement et de l’acceptation par les clients. Il sera toujours temps de revenir en arrière si les alternatives ne sont finalement pas viables.

b. Evaluer l’impact environnemental
Afin de vérifier la pertinence environnementale des alternatives par rapport aux Plastiques à Usage Unique (PUU) d’origine et ainsi d’éviter les transferts d’impacts environnementaux, une évaluation scientifique et technique est nécessaire. Une première évaluation qualitative, comparant les différentes alternatives entre elles et par rapport au PUU d’origine peut être conduite pour orienter les décisions de sélection des alternatives. Dans le cas de l’InterContinental Marseille – Hotel Dieu, c’est une matrice ESQCV qui a été développée par le partenaire scientifique AMVALOR. L’idéal est ensuite de pouvoir mener une évaluation environnementale quantitative plus précise sur certains produits pour lesquels de grandes incertitudes subsistent, en recourant par exemple à des analyses de cycle de vie simplifiées. Il est fortement recommandé de faire appel à un prestataire compétent pour réaliser cette étape.

Informations qui devraient vous être demandées (certaines sont à collecter auprès des fournisseurs pressentis) :

  • La matière du produit / de l’emballage : type de polymère (ex : polypropylène, polyéthylène..), d’additifs utilisés, sa masse
  • La logistique : quel type d’emballage secondaire, tertiaire, quantité d’emballage, localisation du producteur et du fournisseur
  • Les usages : durée de vie du produit, possibilité de réemploi ou de réutilisation, scénario d’usage, conditions de lavage
  • Traitement après usage : tri sélectif, ordures ménagères, …

ZOOM SUR : Les méthodes d’analyse environnementale

Les outils d’analyse environnementale sont utilisés en éco-conception, en phase amont, afin de comparer plusieurs solutions entre elles en termes d’impacts environnementaux. Elles donnent des indications sur différentes catégories d’impacts environnementaux (émission de gaz à effets de serre, pollution de l’eau, impact sur la santé humaine, épuisement des ressources, production de déchets…), et ce en prenant en compte l’ensemble de leur cycle de vie, à savoir de l’extraction de matières premières, la production, la distribution, l’utilisation et la fin de vie (“du berceau à la tombe”).

La méthode ESQCV (évaluation simplifiée et qualitative du cycle de vie) se présente sous la forme d’une matrice permettant de qualifier, à dire d’expert, le niveau d’impact du produit sur chaque phase du cycle de vie vis-à-vis de quelques critères environnementaux identifiés comme pertinents pour le produit. Elle apporte un premier éclairage sur les aspects environnementaux significatifs des PUU et de leurs alternatives sans avoir recours à une collecte détaillée sur le cycle de vie du produit.

L’analyse de cycle de vie (ACV) simplifiée quant à elle permet une comparaison quantitative plus précise. Elle permet de faire des analyses de sensibilité en faisant varier par exemple le nombre de cycle de réemploi.

Ces méthodes ne sont pas parfaites, elles ne prennent par exemple pas encore en compte l’impact du produit s’il finit sa vie dans l’environnement mais donnent de bonnes indications. Elles restent un outil d’orientation des choix en interne, mais la robustesse de leurs résultats n’autorise pas la communication externe.

LE CAS DE L’INTERCONTINENTAL MARSEILLE : L’exemple des bonnets de douche

L’ACV simplifiée a permis de comparer l’impact du bonnet de douche en plastique à usage unique avec l’impact d’un bonnet de douche réutilisable de composition mixte (coton, polyuréthane, polyester, latex). Dans le cas où le bonnet est lavé toutes les deux utilisations (scénario le plus pertinent pour un hôtel), son bilan environnemental commence à devenir meilleur que celui du bonnet en plastique jetable seulement à partir de 250 cycles d’utilisation. Dans notre contexte hôtelier, ce nombre de cycles n’est pas atteignable du fait de la détérioration du produit après les lavages et cette alternative n’a donc pas été retenue.

LE CAS DE L’INTERCONTINENTAL MARSEILLE : L’exemple du kit minot

Vous n’avez jamais entendu parler de Kit Minot ? Venez faire un tour à Marseille ou en Provence ! Les “minots”, c’est un terme populaire pour désigner les enfants. Le Kit Minot de l’InterContinental, c’est donc un kit d’accueil pour les enfants. A l’origine, il contenait de nombreux PUU : un ballon gonflable, un casse-tête en métal dans son emballage plastique, un cerf-volant en plastique, un sachet de bonbons… rassemblés dans un sac en plastique (réemployable). L’hôtel a décidé de le transformer entièrement et de le rendre plus qualitatif. Le nouveau Kit Minot testé pendant le projet, c’est donc un tote bag en coton bio contenant un carnet de coloriage et des crayons de couleurs, une carte postale invitant les enfants à une chasse aux trésors audio dans l’hôtel, et des jeux en bois. L’alternative est zéro plastique, offrant un indicateur de réduction de la masse de PUU égal à 100% ! Mais attention, car les productions de coton (y compris bio) et de papier entraînent de fortes consommations en eau… créant des transferts d’impacts environnementaux. Suite à ce constat, le tote bag a donc été retiré.

L’impact environnemental des alternatives : les résultats simplifiés

Pour les alternatives aux PUU qui restent de l’usage unique (changement de matériau) :

Le niveau d’impact est évalué selon quatre catégories de dommage : le changement climatique, la santé humaine (radiations ionisantes, formation d’ozone photochimique, particules fines), la pollution de l’eau (acidification, eutrophisation en eau douce, eutrophisation en milieu marin, eutrophisation terrestre) et l’épuisement des ressources (utilisation de l’eau, utilisation de ressources non renouvelables).

Pour les alternatives aux PUU qui ne sont plus de l’usage unique :

NOS CONSEILS

Seul le recours à une analyse environnementale sérieuse (réalisée par des experts certifiés) permet de garantir que la situation d’arrivée sera meilleure que celle de départ. Cette analyse est capitale pour s’assurer de la robustesse de la démarche vis-à-vis de l’impact environnemental.

QUELQUES POINTS DE VIGILANCE

Les alternatives réemployables n’ont de sens qu’avec un taux de perte/casse raisonnable, et un nombre de cycles d’utilisation minimum.

Les contraintes suivantes reviennent de manière récurrente lors de la sélection des alternatives : la sécurité alimentaire, les mesures d’hygiène, le risque de casse lié à l’utilisation du verre, l’organisation logistique, la praticité pour le personnel, le maintien du niveau de qualité, l’expérience client. Les anticiper, c’est un premier pas pour les surmonter !

ET QUELQUES FAUSSES BONNES IDÉES

Attention, ce n’est pas parce que vous prenez un plastique biosourcé que son bilan environnemental est forcément meilleur qu’un plastique pétrosourcé. Il faut le vérifier. Et un plastique biosourcé n’est pas forcément biodégradable !

S’il n’y a pas de tri dans les différents espaces de votre hôtel, les solutions à usage unique recyclables ont un sens limité d’un point de vue écologique… Dans ce cas, vous pouvez penser à mettre en place le tri à la source dans différents espaces de l’hôtel (des poubelles sélectives en fonction du type de déchet), après avoir vérifié l’existence des filières de recyclage adaptées.

4.2 Valider les alternatives à tester et passer commande

A l’issue de ces étapes, croisez les résultats de l’évaluation environnementale et de vos critères internes pour sélectionner les alternatives à tester dans l’hôtel. En fonction de la taille de votre hôtel et de son fonctionnement administratif, prévoyez au moins un mois pour les prises de décisions par la direction.

Une fois la liste finale des alternatives validée, vérifiez et précisez vos fournisseurs, vos volumes estimés pour la phase de test, et lancez vos commandes !

POINT DE VIGILANCE

Lors du choix final, un changement par rapport aux alternatives soumises à l’analyse environnementale peut en changer les conclusions…

Si vous choisissez une alternative donnée et que vous changez de fournisseur par rapport à l’alternative soumise à l’analyse environnementale, assurez-vous que la localisation soit similaire ou plus proche de votre hôtel.

Si vous choisissez une alternative donnée et que vous changez de matériau par rapport à l’alternative soumise à l’analyse environnementale :

  • soit une analyse comparative à été faite pour ce type de matériau pour une autre alternative, et par souci de simplicité vous faites l’hypothèse que les résultats sont transposables ;
  • soit il faudrait recommencer l’analyse environnementale comparative – c’est plus rigoureux mais c’est du budget supplémentaire.

LE CAS DE L’INTERCONTINENTAL MARSEILLE : Exemple d’application de la démarche, les sachets de thé

Les sachets de thé individuels en plastique étaient initialement présents en chambre et au buffet du petit déjeuner.

3.1 Comprendre les enjeux d’utilisation
En chambre : L’hôtel met à disposition des sachets pour que le client ait la possibilité de se faire un thé à tout moment de la journée ou de la nuit. La consommation reste faible. L’entretien des chambres est assuré par un contrat de sous-traitance ce qui contraint la flexibilité des gestes du personnel (protocoles). Les sachets répondent à un enjeu de conservation et d’hygiène, le personnel n’a pas besoin de changer le thé entre chaque client.
En restaurant : L’hôtel propose une gamme qualitative de thé en sachets pour le petit déjeuner. Il est nécessaire pour le personnel de réapprovisionner régulièrement le buffet pour s’assurer d’avoir suffisamment de thé pour tenir le temps du petit déjeuner.

3.2 Supprimer, réduire avant de substituer puis 3.3 Recenser les solutions alternatives pour les PUU à remplacer
Inventaire des alternatives aux sachets de thé en plastique :

4.1.a : Identifier collectivement les alternatives pertinentes pour mon hôtel
En raison des usages différents en chambre et au buffet du petit déjeuner, deux alternatives distinctes ont été déployées :
des sachets de thé en papier dans les chambres pour limiter le travail du personnel de ménage, et du thé en vrac associé aux théières à filtre déjà en possession de l’hôtel pour le buffet du
petit déjeuner.

4.1.b : Évaluer l’impact environnemental puis 4.2 : valider les alternatives et passer commande
Les deux options présentant un gain environnemental, les alternatives ont été commandées et déployées.

POINT DE VIGILANCE

L’utilisation des théières de l’hôtel a été proposée lors d’une réunion commune à laquelle le service restauration assistait. Elle n’avait pas été identifiée en amont car le benchmark des alternatives a d’abord été présenté à des interlocuteurs n’ayant pas la vision complète des opérations. Cet exemple montre l’importance d’un dialogue entre les différents acteurs du projet !